«
Tripalium » propose une réflexion sur la valeur travail
et sur la fascination croissante pour le spectacle et les reality
shows, autour d’une rencontre drôle, absurde et tragique
entre quatre personnages qui ne parlent pas la même langue
et se heurtent les uns aux autres autour d’une curieuse
offre d’emploi.
Pour la promotion d’une entreprise internationale de produits
cosmétiques, Jean-Yves Cuvelier est à la recherche
d’une personne qui accepterait de rester derrière
une vitrine, 40 heures par semaine, toute sa vie, pour offrir
aux passants son visage fardé, en permanence. Slogan de
la campagne : « Une vie, ça se maquille ! ».
Des
centaines de chômeurs se sont rués sur cette offre
d’emploi, et trois candidats ont finalement été
retenus : l’Italien Mario, accidenté du travail,
le Philippin Ramon, clandestin affamé, et l’Espagnole
Victoria, terrorisée par la précarité. En
ces temps de crise et d’incertitude, ils sont prêts
à tout pour conquérir une place qui, outre un peu
d’argent, pourrait les rendre célèbres. Jean-Yves
Cuvelier teste la résistance des candidats retenus et prend
soin personnellement de l’organisation d’épreuves
qui doivent l’aider à déterminer le candidat
idéal.
Contraints
de vivre ensemble pendant 3 jours, Mario, Ramon et Victoria, qui
ne parlent pas la même langue, bataillent furieusement pour
être l’élu. Mais entre les épreuves,
dans un climat forcément tendu, ils cherchent pourtant
à communiquer leurs ambitions respectives, leurs expériences
et surtout, leur perception du monde du travail. Tous trois survivants
héroïques d’une expérience professionnelle
qui les a confrontés tantôt au drame des accidents
de travail, tantôt au désespoir de se retrouver sans
travail, tantôt à la difficulté de mener un
conflit au travail, à l’excès de travail,
au harcèlement sur le lieu de travail …, ils confrontent
sans concession et souvent violemment leurs vécus respectifs.
Face
à leur sélectionneur, que faire primer ? Travailler
à tout prix ? La concurrence ou la solidarité ?
L’éthique ou le calcul égoïste ? Devenir
célèbre ? Tels sont les dilemmes qui se posent à
ces trois chômeurs aux aspirations multiples et contradictoires,
échoués un peu par hasard sur cette plage infernale
de la saison capitaliste…
Laboratorio
Amaltea et Collectif 1984
Le
Collectif 1984 participe depuis plusieurs années, aux côtés
de l’association Laboratorio Amaltea, au développement
du Théâtre Action en Italie. Pour son édition
2006, les organisateurs du festival d’été
de San Casciano, auquel collabore le Laboratorio Amaltea, ont
choisi pour thème « Il lavoro rende liberi…
? », ce qui se traduit facilement par « Le travail
rend libre… ? ». C’est cette question en suspens
(il y a un point d’interrogation et des points de suspension)
que le Collectif 1984 et le Laboratorio Amaltea ont pris comme
point de départ pour un spectacle international qui entend
parler de la place du travail et du spectacle dans notre société.
Arguments
Fermetures
d’entreprise, délocalisations, crise… un refrain
bien connu qui crée des conditions de concurrence infernale
sur le marché de l’emploi et force les chômeurs
à accepter n’importe quel travail. L’actualité
a de plus en plus un air de « On achève bien les
chevaux ». La pénurie de jobs « décents
et bien payés » se décline avec la difficulté
de donner un sens à cette activité. « Rien
ne sert d'être vivant, le temps qu'on travaille. L'événement
dont chacun est en droit d'attendre la révélation
du sens de sa propre vie... n'est pas au prix du travail »,
nous disait la Nadja de l’écrivain surréaliste
André Breton.
La
crise met en place une situation où l’on accepte
de travailler à n’importe quel prix, mais produit
simultanément des questionnements troublants sur le «
sens de sa propre vie » pendant cette activité. Mais
finalement, pourquoi bosser ? Juste pour du fric ? Renoncer chaque
jour à 8 heures de vie humaine pour aller souffrir derrière
une caisse de supermarché ou un ordinateur ? Contraints
de travailler pour vivre, le travail s’est imposé
comme une valeur centrale de toute la société, mais
il ne nous rend pas forcément riches et heureux.
Dans
notre spectacle, ce sont ces questions que se posent, avec humour
et par l’absurde, trois demandeurs d’emploi qui, malgré
une expérience professionnelle relativement neuve, ont
pourtant déjà connu licenciements, accidents de
travail, conflits, chômage…
Et
tout cela dans un contexte où se développe aujourd’hui
une fascination croissante pour la richesse et la célébrité,
valeurs dont les télévisions et les journaux nous
fournissent une représentation abondante. L’actualité
médiatique centre tout autour du paraître riche,
du superficiel télévisé, du représenté.
Il ne faut dès lors plus grand-chose à un chômeur
pour se dire que vendre sa tête pour une marque de fromage
ou traîner dans les caniveaux d’une émission
de télé, pourrait peut-être donner un sens
à son activité. Le problème est qu’interpréter
un sourire dans une pub ou un idiot dans un reality show procurent
plutôt rarement la fortune espérée, et qu’en
définitive, cela ne rend pas beaucoup plus heureux que
la flexibilité d’un call-center ou l’anonymat
du travail à la chaîne chez Caterpillar.
En
définitive, que faire face à Tripalium ? Peut-être
simplement d’abord, essayer de comprendre la signification
de ce mot. Vous l’ignorez ? Alors, sans plus attendre, ouvrez
votre dictionnaire au mot « travail » et regardez
son origine étymologique. Le spectacle peut maintenant
commencer…
Mardi 14 Novembre
Grenoble à l’Espace 600, 20h30
Rencontre avec l’équipe artistique à la suite
du spectacle
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